Nous préparons les tables, le matériel d’écriture, les poscas, les crayons, les règles, le thé, le café...
Accompagné.e.s de Christine, arrivent: Dalila, Antonia, Tatiana, Sofia, Mona, Divna, Elif, Karima, Vijaya, Kanista, Nalini, Sathivel et Mohanaradj.
Axel et moi exposons le déroulé de l'atelier, le temps presse, c'est notre dernière séance de manufacture, nous avons à écrire, écrire et écrire sur nos papiers faits main, petits et grands formats.
Christine nous montre le brouillon de ce qui va devenir l'œuvre du jour, un long parchemin écrit à plusieurs voix et plusieurs langues, traduction de leur poème collectif, inspiré de textes choisis dans le Grand Livre du Trésor.
Dans ce poème collectif, des bouts de poèmes, choisis par chacun-chacune des participants et participantes, que nous allons écrire sur les papiers parchemins fabriqués lors de nos deux séances précédentes.
Sur un côté la langue maternelle, de l'autre côté, sa traduction en français.
La petite-grande équipée se met en branle, les rires fusent, les crayons circulent, quelques ratés, ce n'est pas grave, on recommence ! De là, un posca qui fuit, d'ici un trait tiré de travers, de temps en temps une petite faute d'orthographe, qui nous permet de travailler en douceur sur la grammaire française et quelques-unes de ses subtilités...
Nous choisissons les couleurs, nous discutons, nous palabrons, bref, nous faisons des choix ! Telle couleur pour tel texte, dans cet ordre-ci ? ou dans cet ordre-là ? Une vraie leçon de démocratie...chacun aide chacune (et inversement), à trouver le bon mot, améliorer une traduction, bien centrer son texte sur sa feuille.
Axel et moi courons d'un poste à un autre, et nous laissons faire, car il y a du commun, de la joie, de la discussion, de l'échange, de la fabrication, et que tout cela nous émeut bien !
Nous sentons chez tout le monde la fierté d'avoir su travailler pour soi, et en commun.
Chacun y va de sa photo, de sa pose, histoire de marquer le moment, garder une trace de cette drôle d'aventure faite de toutes ces langues, ces mots, ces rencontres.
La parole est libre et joyeuse, œuvrer ensemble avec la matière papier, travailler de ses mains et exiger de soi que cela soit beau, choisir les mots qui nous toucheront nous permet de travailler la langue d'une douce manière, de nous interroger sur la prononciation d'un mot, la place d'un autre dans telle ou telle phrase sans que cela ne soit trop laborieux.
Elif termine en dernier, elle a passé environ 2 h à peaufiner son tableau, et nous livre cette belle phrase en turc, qui pour elle semble résumer ce qui vient de se produire pour elle, et pour toutes et tous : Elline salek (qui se prononce à peu près : El'ne salk). Une phrase qui exprime la joie et/ou la fierté d'avoir fait du beau travail avec ses mains.
Il est 12h, nous devons quitter les lieux, la vie continue, la journée aussi.
Nous nous donnons rendez-vous pour la Journée des Langues du 25 mai 2024, où nous aurons à inventer ensemble la plus belle manière de mettre en valeur tout cet incroyable travail réalisé en si peu de temps.
Tatiana se propose de nous rejoindre vers 11h afin de nous aider à installer notre stand Souffleurs et nous accompagner tout le long de cette journée. Ce que nous acceptons volontiers, car ce moment d'installation nous permettra encore et toujours de parler avec elle, d'user de mots en français que Tatiana ne se lasse pas d'apprendre.
Le reste de la troupe arrivera à 15h, et advienne que pourra, nous savons que ce sera beau et tendre, et qu'une chose nous importe, que toutes et tous soient les rois et reines de cette Journée des Langues et des Cultures d'Aubervilliers.
Dans le cadre d'un cycle de manufactures de langues en partenariat avec l'Association Solidarité Emploi Aubervilliers.
Verbatim d'Estelle Bordaçarre
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